Kate Wagner
Tu écris ? Mais qui est ton éditeur ? Pourquoi ton
livre n’est pas en librairie ? Combien sont logés à cette enseigne rouillée?
Pas de grands éditeurs aux larges vitrines. Ici, c’est le petit éditeur,
l’autoédition ou pour les moins chanceux la cave tapissée de livres payés avec
un crédit. Combien de pépites dans ce désert de sable qui avale tant de textes
? Ils seront bientôt plus nombreux que les lecteurs. C’est sans compter ceux
qui écrivent avec les deux pieds dont le rêve inavoué est d’être numéro un des
ventes. C’est plus facile d’imprimer un livre ennuyeux que de chanter faux. Un
goût de célébrité sur la plume, plus accessible. C’est ceux-là que l’on
retrouve dans les salons à donner des leçons à tous les autres qui portent plus
beaux qu’eux le stylo. Méprisent les sincères, vandalisent les amoureux des
mots. Ils ont la gorge rouge du sang de ceux qu’ils ont réussi à faire douter.
Ils parviennent parfois à vous faire sécher l’encre tant la peur d’être un
mauvais écrivain sera mise en avant. La jalousie et l’envie leurs font faire
des rimes et ils n’ont de cesse de se mettre en avant, quittent à déchirer les
pages des autres. Vous les avez rencontrés ceux-là, au détour d’un stand,
raillant la couverture de votre livre qu’ils estiment trop amateur, vous
donnant conseils sur la subtilité d’un dialogue ou la qualité du portrait de la
quatrième de couverture. Ils ne savent pas que vous écrivez avant tout pour
vous-même et si le partage avec des lecteurs est possible, c’est le seul plus
que vous attendez. Pour vous l’écriture est une musique qui se joue n’importe
où, qui ne se feutre pas chez les intellectuels froids ou chez les
égocentristes frustrés. Vous, c’est écrire votre circulation sanguine. Dommage
si vos livres restent presque confidentiels sans votre photo, ni votre nom en
grand, vous aurez tout de même un avantage sur tous ces crapauds baveux : la
satisfaction de puiser à l’encre de votre âme
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